MANIBA 50-60

MANIBA Rhum "agricole cristal", 50-60° (?), Martinique. Vers 1950/60. 98 cl. Bouchonnage à capsule. UN RHUM ALCHIMIQUE Joyau précieux clôturant notre vente, le "cristal" de MANIBA est à lui seul le paroxysme de l'alchimie du rhum, dans sa version antérieure à l'AOC. Rhum cristal initialement blanc à 50°, il n'échappe pourtant pas à une modification de son ADN, notamment sa couleur, devenue brune. C'est peut-être la raison pour laquelle une main visiblement très assurée (avertie ou non) s'est permise de modifier le "50°" en "60°" au stylo noir sur l'étiquette. Aujourd'hui, avec les procédés issus de l'AOC, un tel changement d'état ne serait aucunement possible sans des interventions particulières et chimiques. Avec son papier fin et brun légèrement piqué orangé quelque peu incliné, cette MANIBA à capsule en aluminium préservant son bouchonnage est un OVNI dans sa conception "rhum cristal" et son illustration sur laquelle il convient de se pencher. LA MARIANNE DU RHUM Déchue de la cartographie actuelle des distilleries martiniquaises, MANIBA est la dernière des colonnes fumantes de Case-Pilote dans le milieu des années 1970. Le verre épais à large épaule de ce milieu du XXe siècle confirme la datation 1950-1965. Rappelons que la départementalisation de la Martinique en 1946, confère à celle-ci une considération républicaine différente. Pourquoi cette digression subite ? Observez bien le triple profil féminin de l'étiquette. Il s'agit au moins de la 2e version de cette illustration pour MANIBA réalisée par un artiste inconnu. Un portrait de femme altier... qui n'est pas sans rappeler la Marianne française du timbre poste d'Edmond DULAC diffusé dès 1945. Visage représentatif anonymisé, la Marianne de DULAC rappelle l'archétype de la figure révolutionnaire avec son bonnet phrygien et surtout, les idéaux qu'il incarne. Et si... Et si MANIBA, en s'éloignant des représentations presque caricaturales habituelles, avait tout simplement voulu faire écho, ou tout du moins, engager un dialogue subtil et subliminal en présentant fièrement un profil de femme antillaise à la coiffe traditionnelle, dupliquée en....trois teintes. Sombre, clair, doré... à l'image de la richesse des carnations de la population martiniquaise ou plutôt ... un clin d'oeil astucieux pour du rhum vieux, blanc ou paille/ambré ? A l'heure des grands questionnements entre les relations Martinique-République française, cette bouteille pose la réflexion avec toute l'ambivalence des rapports historiques et sociaux anciens et contemporains.
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